mardi 25 juin 2013

Camille au Pays des Balles Jaunes


Il est une contrée méconnue des esthètes du volant, un monde terreux, régulièrement en proie à un pilonnage de météorites jaunâtres, emplies  d’hexafluorure de soufre (le SF6) : la planète Roland-Garros.
Dans ce territoire hostile, des créatures difformes (souffrant d’une hypertrophie brachiale latérale) ahanent, des bûcherons dissymétriques s’époumonent, distribuant à tout-va de violents coups de « raquette ». Car, en ce lieu, l’objet élancé, gracile, alliant légèreté et nervosité, que nous, badistes, manions avec préciosité, s’est métamorphosé en un archaïque battoir, en un préhistorique gourdin. De cette massue armés, des colosses cognent, brutalisant des cohortes de pauvres pelotes qui peluchent et finissent par rendre l’âme dans un ultime Pschittt…
Car, ces bourreaux s’échinent à tourmenter des sphères au teint cacochyme, parcourues d’une grisâtre cicatrice (dès leur conception, une longue estafilade prémonitoire altère leur feutrage).
Tandis que les badistes échangent des volants, objet céleste au fuselage tout en délicatesse. Tandis que de  leur dextre, ils font virevolter ces Marylin en jupette blanche, émoustillante crinoline à la délicate dentelure.  Tandis que ces artistes font monter aux cieux l’élégant volant, les « hommes tennis » frappent des balles outrancièrement grimées de jaune, dans une sorte d’incommensurable régression australopithèque.
C’est dans cet univers impitoyable, dans ce Guantanamo parisien où les captives en tenue jaune sont confinées dans des « tubes », où elles sont pressurisées par « boîtes » de 4, que s’est immergé, trois semaines durant, Camille Ferran.
Pour mener à bien sa délicate mission, l'Intrépide n’a pas hésité à se camoufler en « ball boy ».
Car, en effet, pour faciliter la tâche des minotaures qui arpentent les allées de ce dédale, avec en bandoulière une immense besace enfermant tout un arsenal de massues, des « ramasseurs de balles » sont tout spécialement dressés. Ces lutins vert-bleus, marqués du sceau d'affairistes parvenus, issus des faubourgs (le Paris d’en bas), sont conditionnés pour rapporter les balles encore viables à leurs tourmenteurs afin qu’elles soient à nouveau « passées à tamis ».

Prudemment accroupis, pour éviter de se faire foudroyer par un « boulet » mal ajusté, ces elfes profitent de la moindre accalmie pour prestement se faufiler le long des filets récupérer « Emoticon » semi-comateux ou « Smyley » moribonds. Lorsque les bougres n’ont pas totalement explosé, ils les « rabiscoulent » dans leurs menottes afin d'alimenter les canonniers de la terre battue.
Mais, lorsque impotentes, à force d’être molestée, les balles sont jugées hors d’usage, lorsqu’elles sont raplapla ou ont un coup de mou, l’Arbitre, grand ordonnateur des persécutions, réclame des « Balles neuves » ! Les patraques, les impotentes sont alors mises au rebut et disparaissent à tout jamais… recyclées pour être transformées en sols sportifs ! Les commanditaires appelle cette annihilation massive, cette disparition des traces : l’Opération balles jaunes !

Camille very ball boy !
Pour infiltrer cet univers  et espérer approcher au plus près les « monstres », Camille-le-hardi a dû endurer une préparation physique extrême, un drill sportif aux limites du supportable.
C’est, en effet, au terme d’une impitoyable sélection, qu’il a été retenu pour avoir l’honneur de récolter des balles jaunes. Il a ainsi été ciblé parmi quelques trois mille prétendants, répartis sur  tout l’hexagone ! Un exploit à la hauteur de ses remarquables potentialités !
N’est pas en effet, ramasseur de boules blondes qui veut. Cela se mérite. Des sélections-couperets, des camps d’entraînement, où les nominés sont soumis à des conditions de vie extrême, sont organisés et seuls ceux qui en réchappent peuvent prétendre côtoyer la crème du tennis mondial. Camille est ainsi sorti encore vivace d’un stage qui a rassemblé une semaine durant, à la Grande-Motte, le top du top des fortiches du tennis héraultais. Au cours de cet endurcissement, il a subit une préparation intensive : 5 heures quotidiennes de manœuvres sportives, mais très certainement aussi, dissection de sphères dorées, décorticage des trajectoires improbables des projectiles et surtout impérative remise à niveau en english (« out », « let », voire « in », n’ont désormais plus aucun secret pour lui) !
Une claustration où il a dû endurer les pires privations : privation de portable (quasiment plus aucun lien avec le monde extérieur), privation d’Internet et de jeux vidéos ! et… privation de sommeil ! Interdiction de roupiller avant minuit, voire une heure du mat. Obligation de visionner des films ou de jouer aux cartes jusqu’à point d’heure, avec réveil en fanfare à 6h 30 ! Pas de sieste non plus ! « En gros rien », comme il nous l’a confié dans un souffle. Ce régime drastique dans le but de tester les capacités des organismes juvéniles à résister à l'appétit chronophage du loup-Garros, un lycanthrope dévoreur de temps de repos.
Sorti vainqueur de cette épreuve, Camille a donc été l'un des 200 jeunes de 12 à 16 ans sélectionnés à travers toute la France pour s'immerger trois semaines dans un des temples du tennis mondial, une sorte d’école buissonnière pour la bonne cause. Nonobstant, il a fait valoir ses qualités de sprinter, son dynamisme, sa tonicité, sa souplesse, sa vista, autant de qualités intrinsèques à la pratique du… badminton, sport complet auquel il s’adonne avec succès au sein de l’AS Alain Savary !
Badiste accompli, il s’est certes prêté à moultes cérémonies d’adoubement en mettant régulièrement genoux à terre face à quelques maîtres ès-tennis : l’Impressionnant Tsonga, le Fabuleux Federer, le Titanesque Djokovic ou encore le Roi Nadal (The number one). Mais gageons qu’en ces instants de génuflexions, où il était bien contraint de s’incliner devant ces « pointures », un volant guilleret continuait à tournoyer dans sa caboche et à lui redonner espoir.
L’occasion d’échapper à cet assujettissement n’allait effectivement pas tarder à se présenter à lui. Profitant d’une cérémonie dite de clôture durant laquelle tous les yeux étaient braqués sur le mâle dominant afféré à croquer sa huitième Coupe des Mousquetaires, Camille s’est fait la Belle, usant sans nul doute des qualités de grimpeur qu’il peaufine tous les jeudis en faisant le mur à Prades-le-Lez. De nuit, il a taillé son chemin,  avec en point de mire le Pic, pour rejoindre, quelque peu exténué, Le Triadou, où il s’est effondré tout un lundi pour récupérer de son périple. Ce n’est que le mercredi suivant que ce descendant d’une longue lignée de Maréchaux, réputés pour dompter le Fer, est revenu aux entraînements de bad en arborant un large sourire, celui qui illumine le visage des braves de retour, leur Mission accompli. Un Camille nouveau est donc réapparu, sûr de lui, grandi par cette aventure hors norme et prêt à reprendre du service au sein de l’escadrille des AS-D-AS et... du TCSMT, le Tennis Club de St Mathieu, dont il est aussi un joueur chevronné !

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